L'impôt sur le revenu des artistes-auteurs
Comment ça fonctionne l’impôt sur le revenu pour les artistes-auteurs ? Je t’explique comment déclarer et quelles cotisations sociales tu vas devoir payer.
Si en tant que salarié, l’employeur se charge de régler les cotisations sociales pour le compte de l’employé, et l’impôt est généralement prélevé à la source, et la déclaration dûment pré-remplie, ce n’est pas le cas des artistes-auteurs, qui doivent eux-mêmes s’acquitter de leurs cotisations sociales, et démêler les nœuds de leur déclaration d’impôts sur le revenu.
L’impôt sur le revenu
Pour ce qui est des cotisations sociales, et donc de l’URSSAF, toutes les explications se trouvent ici. Mais régler ses cotisations sociales ne suffit pas, il faut bien sûr déclarer son impôt sur le revenu. Et là… dans quelle case faut-il déclarer ? Doit-on déclarer le brut, ou le net ? Y a-t-il des lois spécifiques aux artistes-auteurs quand il est question de sa déclaration d’impôts sur le revenu ? Allez, on regarde comment faire, pas à pas.
Tu es rémunéré en traitements et salaires et/ou tu n’as pas de SIRET en tant qu’artiste-auteur (mais tu es bien artiste-auteur, juste tu n’as pas de SIRET pour cette activité, donc tu n’as pas la possibilité d’émettre des factures).
Sont rémunérés en traitements et salaires les auteurs publiés par des maisons d’édition. Leur maison d’édition déclare pour eux leurs cotisations sociales, et ils sont généralement précomptés, c’est-à-dire qu’ils ne règlent pas leurs cotisations sociales eux-mêmes, elles sont déduites du montant net versé par la maison d’édition, qui s’acquitte alors des cotisations sociales pour leur compte.
Dans ta déclaration annuelle à l’URSSAF, tu peux retrouver le montant brut de tes droits d’auteur, normalement reporté automatiquement. Si ce n’est pas le cas, tu peux demander une attestation de droits d’auteur à tes différents éditeurs pour obtenir le montant à déclarer du côté des impôts.
Tu es en traitements et salaires
Tu es en traitements et salaires : cela concerne la majorité des cas des revenus issus de maisons d’édition.
1 – Tu choisis d’être au forfait pour tes frais
Qu’est-ce que ça veut dire que ça ? Ça veut dire que tu bénéficies d’un abattement automatique de 10% pour tes frais engagés dans le cadre de ton activité professionnelle. C’est le même montant d’abattement que pour les salariés. Tu n’as rien de spécial à faire, tu n’as pas à le déduire d’où que ce soit, quand tu vas remplir ta déclaration d’impôts, l’état va calculer automatiquement cet abattement.
Tu vas donc déclarer ton net imposable en case 1GH (pour le déclarant 1) ou 1HF (pour le déclarant 2 si tu co-déclares avec quelqu’un d’autre tes impôts).
Mais comment calcule-t-on ce net imposable ? Car l’URSSAF, et tes éditeurs, te donneront le montant brut de tes droits d’auteurs, et ne t’indiqueront pas ton net imposable. Tu n’auras pas, comme pour les salariés, la mention de ton net imposable sur ton dernier bulletin de salaire de l’année. Ici, c’est à toi de le calculer. Deux solutions, tu le fais toi-même : tu prends ton montant brut hors taxes, auquel tu déduis les cotisations sociales obligatoires (URSSAF, IRCEC), tu rajoutes la CSG/CRDS pour les parties non déductibles, et l’éventuelle TVA versée par ton éditeur.
Tout ça ressemble à du charabia ? Ce n’est pas grave, il y a un moyen plus simple, utilise la calculette de la SGDL, qui est bien pratique : https://www.sgdl.org/sgdl-accueil/services-de-la-sgdl/la-remuneration/la-calculette-des-droits-d-auteurs
Attention, cette calculette ne prend pas en compte le montant de l’IRCEC, qui est aussi à déduire de tes droits d’auteur brut pour calculer ton net imposable. Mais elle fait déjà une bonne partie du job. Utilise-la, parce que toutes les cotisations sociales ne sont pas déductibles et on fait vite une erreur.
L’IRCEC est une cotisation sociale obligatoire à partir de 9 513€. Pour rappel, l’article sur l’URSSAF qui t’explique tout ça se trouve ici. Si jamais tu ne sais pas si tu dois, ou non de l’IRCEC, tu peux utiliser le simulateur URSSAF juste ici et rentrer les informations concernant tes revenus. Faisons-le avec mon exemple de 10 000 euros de revenus brut en traitements et salaires.
Tu vois que le site de l’URSSAF me propose, tout en bas, de cotiser sur la base d’un taux réduit. J’explique tout ça dans l’article sur l’URSSAF Pour notre exemple ici, qui consiste simplement à déduire le montant de notre net imposable, partons de la base que la cotisation se fait sur un taux réduit, puisque la majorité des auteurs choisissent de cotiser sur un taux réduit tant qu’ils le peuvent (à partir de 28 539€ de revenus, il n’est plus possible d’opter pour ce taux réduit du côté de l’IRCEC, à moins d’être adhérent à la Sofia, qui prend en charge la moitié de ton IRCEC).
Je complète donc la simulation, et on peut observer que le montant de mon IRCEC a été divisé par deux, car en optant pour le taux réduit, j’ai donc cotisé à hauteur de 4% au lieu de 8%.
Je reprends donc mon net imposable précédent, obtenu via la calculette de la SGDL, auquel je retire ces 400 euros d’IRCEC qui ne sont pas inclus dans la calculette de la SGDL.
Mon net imposable est donc de 8 681,90€ – 400€ = 8 281,90€
Il n’est pas possible d’indiquer un montant avec des virgules dans sa déclaration d’impôts sur le revenu, on arrondit donc à l’euro le plus proche. Je déclare 8 282€.
Une fois ton net imposable calculé, tu n’as plus qu’à le reporter dans la fameuse case 1GH ou 1HF en fonction de si tu es déclarant 1 ou déclarant 2. Il n’y a rien d’autre à faire de spécifique dans le cadre d’un artiste-auteur en traitements et salaires au forfait.
En allant au bout de la simulation, tu vois bien que l’abattement de 10% a été pris en compte automatiquement :
J’ai indiqué 8282 euros, l’état a calculé 10% d’abattement soit 828,20€, arrondi à 828€.
8282€ – 828€ = 7 454€
L’état utilise donc bien le revenu après abattement pour calculer l’impôt dû. Les informations essentielles à retenir si tu es en traitements et salaires au forfait :
- tu calcules ton net imposable
- tu déclares ce net imposable en case 1GH ou 1HF
2 – Tu es au réel pour tes frais
Tu choisis d’opter pour les frais réels, plutôt que pour l’abattement au forfait de 10%. Tu estimes que tes frais sont plus élevés que les 10% du forfait, et du coup, tu vas déclarer tes frais, pour pouvoir les déduire de ton impôt.
Attention, quand on opte pour les frais réels, il faut être capable de prouver ces frais à l’état, tu dois donc conserver les justificatifs et tenir une comptabilité pour tes frais, sans nécessairement faire appel à un comptable. Simplement, si l’état demande à contrôler ta déclaration de frais, tu dois pouvoir justifier le montant.
Cette fois, comme tu es au réel, tu vas déclarer ton montant brut TTC cette fois dans la case 1GH ou 1HF (en fonction de si tu es déclarant 1 ou 2). Tu ne calcules donc pas ton net imposable. Tu déclares bien le montant brut TTC.
Puis en case 1AK ou 1BK (sur le formulaire 2042) tu vas déclarer le montant de tes frais réels. Qu’est-ce qui rentre dans cette case des frais réels ? Le montant de tes cotisations sociales obligatoires déductibles, l’éventuelle TVA versée par les diffuseurs au Trésor pour ton compte, l’achat de matériel, le montant des locaux si tu en loues, les frais de communication, d’achats de logiciels, d’abonnements, la documentation, les frais de déplacements… il y a quelques règles.
Par exemple l’achat de matériel, au-delà de 500 euros, doit être amorti, et non déduit (mais là, demande à un ami comptable). L’important est de garder les justificatifs pendant 4 ans et de faire un tableau détaillé des charges.
Attention toutes les cotisations sociales ne sont pas déductibles, utilise bien la calculette de la SGDL et retranche ensuite le montant de l’IRCEC que tu as payé.
Imaginons, en 2022, tu as gagné 10 000€ brut de droits d’auteurs en traitements et salaires. Dressons la liste de frais imaginaires :
URSSAF : 1 318€ déductibles (différence entre le brut et le net imposable indiqué après simulation sur le site de la SGDL et arrondi)
IRCEC : 400€ si tu as opté pour la base en taux réduit à 4% (tu peux opter pour cette base de taux réduit jusqu’à 28 539€ de revenus), sinon 800€ (tu peux simuler tes cotisations sociales ici ) à moins que tu aies adhéré à la Sofia qui prend en charge la moitié de ton IRCEC.
Frais de couverture : 700€
Frais de correction : 1 600€
Frais de publicité : 500€
Conserve bien toutes les factures et justificatifs liés à ces frais.
Nous avons donc un montant total de frais de 4 518€. Je remplis alors la case 1AK (ou 1BK si tu es déclarant 2) avec le montant de 4 518€.
L’état calculera ainsi la base imposable après avoir retranché tes frais réels du montant brut TTC de tes droits, donc la case 1GH moins la case 1AK.
Et effectivement, on observe sur le résultat de la simulation, que l’état prend en compte ton revenu fiscal de référence après avoir déduit tes frais.
Les informations essentielles à retenir si tu es en traitements et salaires au forfait :
- tu déclares ton brut TTC en case 1GH ou 1HF
- tu calcules la somme de tes frais
- tu déclares ces frais en case 1AK ou 1BK
Fais bien tes simulations pour vérifier ce qui est le plus intéressant pour toi en fonction des frais engagés. La plupart du temps, les artistes-auteurs rémunérés en traitements et salaires sont au forfait, car la maison d’édition prend en charge tous les frais associés à cette activité, mais il est possible que tu sois dans un cas particulier. Pour le savoir, calcule la somme de tes frais déductibles autorisés (et justifiables), et n’hésite pas faire la simulation sur le site impots.gouv
Autoédition et BNC
Tu es en BNC (Bénéfices Non Commerciaux) : cela concerne les autoédités. Pour ce qui est d’être en micro-BNC ou au régime du réel (déclaration contrôlée), c’est quelque chose qu’on choisit au moment de créer son statut (le moment où tu fais ta demande de SIRET, où tu immatricules l’entreprise), mais sache que tu peux changer de régime en cours de route.
1 – Tu es sous le régime spécial micro-BNC, c’est-à-dire au forfait pour tes frais
Ce n’est possible que si ton chiffre d’affaires brut HT est inférieur à 72 600€HT. Cette fois, tu ne vas pas déclarer le montant net imposable, tu vas déclarer ton chiffre d’affaires brut HT, dans la case 5HQ (si tu es déclarant 1) ou 5IQ (si tu es déclarant 2). Tu n’as rien à déduire, tu bénéficies automatiquement d’un abattement forfaitaire de 34%. C’est-à-dire qu’on considère que tu as 34% de frais déductibles sur ton chiffre d’affaires, cotisations sociales incluses. Donc attention, ce n’est pas toujours si intéressant que ça d’être au régime forfaitaire. Les cotisations sociales mangent une bonne partie de l’abattement.
Tu n’as rien à calculer dans ta feuille d’impôts, tu n’as rien à déduire. Si tu déclares par exemple 10 000 euros de chiffres d’affaires, l’état va automatiquement calculer un abattement de 3 400€ et tu seras imposé sur le revenu uniquement sur la base de 6 600€. Je ne prends pas en compte le nombre de parts dans ton foyer pour cet exemple bien sûr.
Ci-dessous la démarche à effectuer.
Tu vas d’abord indiquer la nature de tes revenus, il s’agit de revenus non commerciaux professionnels :
Tu remplis ensuite la case 5HQ ou 5IQ en fonction de si tu es déclarant 1 ou 2, avec le montant BRUT HT :
Il n’y a rien d’autres à remplir pour tes revenus artistes-auteur. L’état calcule automatiquement ton abattement de 34%, comme tu peux le voir à la fin de la simulation. Tu seras imposé sur une base de 6 600€ et non pas 10 000€.
2 – Tu es bien en BNC, mais sous le régime du réel (déclaration contrôlée)
C’est obligatoire si ton chiffre d’affaires annuel brut HT est supérieur à 72 600€. Et s’il ne l’est pas, tu peux opter pour la déclaration contrôlée malgré tout. C’est un choix qui se fait au moment de créer ton entreprise, et que tu peux ensuite modifier plus tard.
Cette fois, on va déclarer en case 5QI, et on va déclarer le bénéfice imposable.
Comment calcule-t-on ce bénéfice imposable ?
On prend le chiffre d’affaires HT brut et on retire les dépenses réelles engagées, y compris les cotisations sociales obligatoires.
Reprenons l’exemple avec 10 000€HT de chiffres d’affaires. Imaginons une liste de frais :
Frais de couverture : 700€
Frais de correction : 1 600€
Frais de publicité : 500€
Conserve bien toutes les factures et justificatifs liés à ces frais. Le montant total des frais (hors cotisations sociales) s’élève à 2 800€.
Je calcule le versement des cotisations sociales, en incluant les frais (hors cotisations sociales) grâce au simulateur de l’URSSAF (enfin normalement à ce stade, tu as déjà fait ta déclaration annuelle auprès de l’URSSAF du Limousin et tu sais déjà combien tu as payé, mais pour mon exemple, j’utilise le simulateur que tu peux trouver ici
Il est à noter qu’en BNC au régime réel (déclaration contrôlée), on indique le montant de son bénéfice au moment de faire sa déclaration à l’URSSAF, d’où le fait qu’il est possible, dans le simulateur, de déduire les frais quand on lui indique être en déclaration contrôlée (il suffit de dire « non » quand il demande si on est en micro-BNC juste en-dessous de la simulation) :
J’ai donc 1 341€ de cotisations sociales, et je n’ai pas d’IRCEC.
Attention toutes les cotisations sociales ne sont pas déductibles de l’impôt sur le revenu ensuite.
La CSG, qui est prélevé à hauteur de 9,2% (calculée sur 98,25% du montant brut), n’est déductible qu’à hauteur de 6,8%. La CRDS (0,5% calculée sur 98,25% du montant brut) n’est pas déductible. « Nan mais Jupi c’est quoi ce charabia ? »
La CSG et la CRDS sont deux cotisations auxquelles tu contribues à travers l’URSSAF. Tu vas bien la payer, mais tu n’as pas le droit de déduire la totalité de ce montant pour calculer ton bénéfice imposable. Je te propose un petit de l’état pour vérifier ça : https://www.demarches.interieur.gouv.fr/particuliers/csg-crds-revenus-activite-remplacement
Et l’encadré précis qui t’intéresse :
Il est possible de cliquer en bas du simulateur de l’URSSAF pour voir la répartition des cotisations sociales. Ainsi, je clique sur « CSG-CRDS » :
Et le détail apparaît :
Donc sur mes 1 341€ de cotisations, j’ai :
- 37,95€ de CRDS, qui n’est pas déductible
- 698,28€ de CSG, sur lequel je peux déduire une partie
Pour calculer la partie déductible, on peut repartir du montant brut déclaré :
7 200€ x 98,25% = 7 074€ (c’est sur cette base que la CSG est calculée)
7 074€ x 6,8% = 481,032€ qu’on arrondira à 481€
Donc je ne peux pas déduire la totalité des 736,23€ qui concernent la CSG et la CRDS, j’ai uniquement le droit de déduire 481€ pour cette partie.
736,23 – 481 = 255,23€ de différence.
Je reprends mes 1 341€ de cotisations sociales globales, je retire 255,23€, il me reste 1 085,77€ que là, j’ai le droit de déduire.
Honnêtement, tout le monde ne s’embête pas à aller jusque-là dans le détail de ce qu’on a le droit de déduire ou non, je pense. Déjà, pour trouver l’info comme quoi tu n’as pas le droit de déduire totalement cette partie, c’est la galère. Alors je pense que 99% des gens qui font ça en toute autonomie, déduisent la totalité de leurs cotisations sociales. Mais la règle dit bien qu’il y a une part non déductible dans la CSG et que la CRDS n’est pas déductible de l’impôt sur le revenu, alors j’applique la règle.
Note : si tu galères, tu peux faire appel à un AGA ou OGA (Organisme de Gestion Agréé) pour t’aider, on voit ça un peu plus bas, sinon tout simplement à un comptable
Le montant total de mes frais s’élève alors à 2 800€ + 1 086€ = 3 886€
Je dois donc déclarer 6 114€ de bénéfices imposables.
Passons à la déclaration de l’impôt sur le revenu. Ces revenus sont des revenus non commerciaux professionnels :
Ici, on remplit donc soit la case 5QI (ou 5RI si on est déclarant 2) :
Mais Jupi, que s’est-il passé ? J’ai indiqué 5 859€ dans mes revenus, mais à la fin de la simulation, l’état a pris 6 725€ comme base :
Oui, parce qu’en déclaration contrôlée, il y a une majoration de 10% pour les revenus de l’année 2022 quand tu déclares en BNC au régime réel. En 2021, c’était 15%, en 2020, c’était 20% et avant ça, c’était 25%. À partir de 2023 (et donc la déclaration 2024 sur les revenus de 2023), cette majoration disparaîtra.
Pour faire sauter cette majoration, il fallait adhérer à une AGA, ou une OGA (Organisme de Gestion Agréée), ou avoir un viseur. Si tu as adhéré à un tel organisme, tu pouvais (et peux encore pour tes revenus 2022) alors utiliser la case 5QC :
Et cette fois, la majoration n’est pas appliquée :
Cette non-majoration quand on adhère à un OGA, va sauter l’année prochaine. Je ne t’explique donc pas pourquoi elle était en place, puisqu’à partir des revenus 2023, cet avantage pour ceux qui ont adhéré à une OGA disparaît, et il n’y aura plus de majoration, adhérent ou non, à une OGA.
Si tu veux en savoir plus sur le sujet de l’OGA, tu as un article très bien fait sur le site de comptabilite.ooreka qui t’explique ce que c’est et t’explique aussi la disparition des avantages fiscaux liés à l’adhésion à un OGA.
L’étalement des revenus d’artiste-auteur
Si tu es imposé en BNC et en déclaration contrôlée, ou si tu choisis d’être en déclaration contrôlée, tu peux bénéficier des dispositions de l’article 100 bis.
Il est à noter que selon le site de la SGDL au bas de cette page ici, et un tas d’autres sites, apparemment les revenus d’auteurs en traitements et salaires peuvent eux aussi bénéficier de cet article. Pour ma part, après avoir lu et relu les articles concernés, qui encadrent les professions littéraires concernées ainsi que la manière dont elles se déclarent, et les avoir également lu avec mon contrôleur des impôts, qui a pris du temps pour m’éclairer à ce sujet, et auquel je dis mille fois mercis, il ne me semble pas que les auteurs en traitements et salaires puissent bénéficier de l’étalement.
D’autres professions artistiques, notamment dans l’industrie du spectacle, le peuvent. Mais les auteurs de livres, en traitements et salaires, n’ont pas l’air concernés par ces textes. J’ai fait la demande via un rescrit pour m’en assurer, mais la réponse pourrait mettre des mois à nous parvenir.
Comme c’est toujours méga clair, les textes du gouvernement, je te fais la traduction de l’article 100 bis.
En tant qu’auteur en BNC, ayant opté pour la déclaration contrôlée, tu as le droit de demander à l’étalement de tes revenus sur 3 à 5 ans. Cette loi est prévue pour lisser tes revenus sur une plus longue durée, en raison de la fluctuation importante que les artistes peuvent connaître dans leurs revenus.
Tu peux avoir un titre qui marche super bien en année 1, et percevoir beaucoup de revenus, pour finalement retomber très bas l’année suivante. Si on avait fait la moyenne de tes revenus sur ces deux années, ton impôt aurait été correct. Mais là, la première année, tu pourrais être imposé dans la tranche la plus haute de l’impôt si tes revenus ont explosé, ce qui est très désavantageux pour toi, et l’année suivante tu pourrais ne pas être imposé du tout. Afin de ne pas faire le yoyo, il existe cet article 100 bis.
Un exemple sera sûrement plus parlant. Imaginons tes bénéfices imposables de 2022 et des années suivantes :
- 2022 : 55 500€
- 2023 : 12 000€
- 2024 : 75 000€
- 2025 : 33 000€
- 2026 : 44 000€
Si tu déclarais « normalement » et en admettant que tu aies un OGA pour 2022, et que tu sois seul dans ton foyer, voici ce que tu paierais comme impôts sur le revenu :
- 2022 : 10 094€
- 2023 : 0€
- 2024 : 16 094€
- 2025 : 3 494€
- 2026 : 6 794€
- Soit un total, sur 5 ans, de 36 476€
Maintenant, utilisons l’article 100 bis pour notre déclaration, et utilisons-le pour une période de 5 ans, voici ce qu’il se passe :
- 2022 : on déclare 1/5e de 2022 soit 11 100€, montant de l’impôt : 0€
- 2023 : on déclare 1/5e de 2022 + 1/5e de 2023, soit 11 000€ + 2 400€ = 13 400€, montant de l’impôt : 0€
- 2024 : on déclare 1/5e de 2022 + 1/5e de 2023 + 1/5e de 2024, soit 11 000€ + 2 400€ + 15 000€ = 28 400€, montant de l’impôt : 2 114€
- 2025 : on déclare 1/5e de 2022 + 1/5e de 2023 + 1/5e de 2024 + 1/5e de 2025, soit 11 000€ + 2 400€ + 15 000€ + 6 600€ = 35 000€, montant de l’impôt : 4 094€
- 2026 : on déclare 1/5e de 2022 + 1/5e de 2023 + 1/5e de 2024 + 1/5e de 2025 + 1/5e de 2026, soit 11 000€ + 2 400€ + 15 000€ + 6 600€ + 8 800€ = 43 800€, montant de l’impôt : 6 734€
Alors tu n’as pas fini, en 2026, de payer l’impôt sur les années précédentes, mais si on compare l’impôt que tu as payé sur les 5 premières années avec une déclaration classique, et l’impôt que tu as payé sur les 5 premières années avec une déclaration en utilisant l’article 100 bis, on a un écart assez important. Avec l’article 100 bis, tu as déboursé 12 942€ VS 36 476€ avec la solution classique.
ATTENTION, tu n’as pas fini de payer. Si tu as bien compris le système, les années suivantes continuent de couler avec l’article 100 bis :
- 2027 : on déclare 1/5e de 2023 + 1/5e de 2024 + 1/5e de 2025 + 1/5e de 2026 + 1/5e de 2027
- 2028 : on déclare 1/5e de 2024 + 1/5e de 2025 + 1/5e de 2026 + 1/5e de 2027 + 1/5e de 2028
- 2029 : …
Mais si tes revenus s’arrêtaient en 2027, ou diminuaient drastiquement ensuite, ce serait quand même une meilleure solution que la solution classique. Et s’ils se stabilisaient, tu aurais quand même économisé ces 5 premières années.
Cet article vise à établir une moyenne de tes revenus, pour t’éviter des impositions trop lourdes les années où tu gagnes beaucoup, et permet ainsi de répartir tes revenus sur plusieurs années. Tu peux choisir d’utiliser ce dispositif sur une durée de 3 ou 5 ans (pas 4). Une fois que tu lances ce dispositif, il est valable pour les années qui suivent, jusqu’à ce que tu fasses un courrier pour dire « stop ». Attention, si tu dis stop, cela signifie que tu arrêtes de procéder à la moyenne de tes revenus à partir de l’année où tu envoies le courrier, mais tu devras quand même déclarer les reliquats dans tes futures déclarations.
Reprenons notre exemple, et disons qu’en 2025 tu décides d’arrêter d’utiliser l’article 100 bis, voici ce que tu devrais déclarer :
- 2022 : on déclare 1/5e de 2022 soit 11 100€
- 2023 : on déclare 1/5e de 2022 + 1/5e de 2023, soit 11 000€ + 2 400€ = 13 400€
- 2024 : on déclare 1/5e de 2022 + 1/5e de 2023 + 1/5e de 2024, soit 11 000€ + 2 400€ + 15 000€ = 28 400€
- 2025 : on déclare 1/5e de 2022 + 1/5e de 2023 + 1/5e de 2024 + 2025, soit 11 000€ + 2 400€ + 15 000€ + 33 000€ = 61 400€
- 2026 : on déclare 1/5e de 2022 + 1/5e de 2023 + 1/5e de 2024 + 2026, soit 11 000€ + 2 400€ + 15 000€ + 44 000€ = 72 400€
- 2027 : on déclare 1/5e de 2023 + 1/5e de 2024 + 2027
- 2028 : on déclare 1/5e de 2024 + 2028
- 2029 : on déclare 2029 uniquement
Il faut donc beaucoup de temps pour sortir de cet article 100 bis si on souhaite un jour en sortir. Généralement, quand on commence à l’appliquer, on en sort seulement le jour où on s’arrête, ou alors quand l’activité a très fortement baissé.
Comment fait-on pour utiliser ce dispositif ?
Pour le coup, c’est simple ! Si, si !
Tu déclares 1/5e de ton bénéficie imposable en 5QC ou 5QI en fonction de si tu as adhéré ou non à un OGA. Bien sûr il est probable que l’année prochaine ces deux cases fusionnent du fait que la majoration disparaît.
Si tu penses que tu peux utiliser ce dispositif en traitements et salaires aussi… Comme indiqué plus haut, à la lecture des articles avec le contrôleur des impôts, il ne nous semble pas que ce soit le cas, mais comme beaucoup de sites spécialisés semblent dire que ça l’est, mais sans pointer les articles qui le justifient, il est possible que ça le soit, et c’est pour ça que j’ai demandé un rescrit afin d’être fixée. Néanmoins, si tu veux tenter ta chance, tu déclares aussi 1/5e de tes revenus imposables dans les mêmes cases que si tu déclarais la totalité.
Tu accompagnes ta déclaration, soit d’un mot écrit qui précise l’utilisation de l’article 100 bis et indique le nombre d’années sur lesquelles tu veux prendre le dispositif (3 ou 5 ans), soit tu fais comme moi et tu mets un commentaire dans ta déclaration pour préciser l’utilisation de l’article 100 bis sur 5 ans. Tu peux également ajouter un tableau détaillant le calcul chaque année.
Le jour où tu souhaites révoquer cette option, il faudra joindre une lettre, ou encore une fois un commentaire à ta déclaration. Si tu as des doutes, tu peux aller directement à ton centre d’impôts pour qu’ils t’aiguillent ou les joindre par téléphone. Notons que l’article 100 bis n’est pas beaucoup utilisé, ne sois donc pas étonné si la personne que tu as au téléphone ou que tu rencontres n’est pas au courant de cet article. C’est un dispositif vraiment spécifique à certaines professions, notamment les auteurs de livres.
C’est pour ça que c’est important que TOI tu sois renseigné, pour pouvoir bien l’expliquer au contrôleur des impôts qui n’a peut-être jamais vu passer le 100 bis (et c’est normal, c’est rare, et c’est OK, ils sont chous nos contrôleurs et ils ne peuvent pas connaître l’intégralité du code des impôts par cœur, vu la taille du truc et sa complexité).
Et les années suivantes, tu continues de déclarer correctement les bons 1/5e en les additionnant, de préciser l’utilisation de l’article 100 bis, et de joindre le tableau (pour ma part je ne joins pas le tableau et tout se passe bien, mais j’ai eu de longues discussions avec mon contrôleur sur le sujet donc il est bien au fait du dossier).
Tu es arrivé au bout de ton périple, bravo !
J’en profite pour préciser un point important : les artistes-auteurs ne sont PAS assujettis à la CFE. Si jamais tu reçois un avis de CFE pour ton SIRET d’artiste-auteur, c’est une erreur. Tu peux le renvoyer barré et indiqué que tu es artiste-auteur, sans régler la CFE.
Attention, si tu as aussi une micro-entreprise, cet avis de CFE est peut-être pour ta micro-entreprise.